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  • Article publié le 11 juin 2021
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« Marine Le Pen n’est absolument pas du côté des travailleurs »

Vendredi 11 Juin 2021 Naïm Sakhi L’HUMANITE

Natacha Pommet Secrétaire générale de la Fédération CGT des Services publics
« Aujourd’hui, il n’y a plus de complexe chez les gens qui défendent des idées d’extrême droite. Ils s’attaquent aux étrangers, à ceux qui défendent les droits de l’homme. Comme le montre ce youtubeur qui reproduit l’attaque d’un militant insoumis. C’est une idéologie qui prône la violence. Il y a quelques années, ça aurait provoqué une large vague de manifestations, de réactions fortes de la population. Mais, aujourd’hui, il y a une grande indifférence. Il est temps que le peuple de gauche s’affirme haut et fort. Les idées d’extrême droite ne doivent pas continuer à occuper l’espace médiatique et ne doivent pas être vues comme un recours contre des années de politique austéritaire, de droite comme de gauche. J’espère que ces manifestations seront bien remplies et que ça enverra un signal fort, dans un climat inquiétant. Marine Le Pen est très antisyndicale. Elle a une dent contre la CGT. Quand, il y a plus d’un an, nous avions déposé un préavis de grève à la Fédération des Services publics, Marine Le Pen avait crié haro contre la CGT en disant qu’on avait un comportement honteux. Elle n’est absolument pas du côté des travailleurs. Et on le voit dans les collectivités aux mains du RN, les fonctionnaires ne sont pas des personnes qu’ils veulent garder. Ils participent à la casse de la fonction publique et du statut de fonctionnaire. Ils préfèrent privilégier le recrutement direct qu’on appelle du clientélisme et avoir des agents aux ordres. »

Syndicalisme. Combattre l’extrême droite dès le piquet de grève
Jeudi 10 Juin 2021 Juliette Barot Cyprien Boganda L’HUMANITÉ

Alors que les idées du Rassemblement national pénètrent dans les usines, le dialogue reste la meilleure arme pour les militants syndicaux. La CGT, notamment, poursuit inlassablement son travail de formation locale.

L’affaire avait conduit Laurent Escure, secrétaire national de l’UNSA, à un discours véhément lors du conseil national de son syndicat. Deux responsables de fédération venaient d’annoncer leur candidature sur des listes du Rassemblement national pour les élections des 20 et 27 juin. De quoi provoquer l’ire du chef syndical. « Le Rassemblement national n’est pas un parti républicain. Il s’attaque aux libertés syndicales, comme le montrent les actions de ses alliés européens », martèle Laurent Escure, qui rappelle que les candidatures de Stéphane Blanchon et Luc Doumont - l’un aux régionales, l’autre aux départementales -, contraires à la charte de valeurs de l’Unsa, ont conduit à leur exclusion de fait. Si ces transfuges syndicalistes vers des candidatures d’extrême droite restent largement minoritaires, ils symbolisent l’acmé de la diffusion des idées du Rassemblement national, qui profite de la détresse sociale pour infuser jusque chez certains adhérents syndicaux.

Décortiquer l’argumentaire
« Le Front national essaie de s’implanter dans le monde syndical depuis les années 1990, époque où ses responsables se sont aperçus qu’ils captaient un électorat de plus en plus populaire, explique le politologue Dominique Andolfatto. S’intéresser aux réseaux syndicaux leur permettait de faire d’une pierre deux coups, en renforçant leur audience dans le monde du travail tout en attirant des militants bien formés et expérimentés qui pouvaient devenir ensuite des cadres de l’appareil frontiste. »

C’est donc à cette époque que s’est créée l’association Vigilance initiative syndicale antifasciste (Visa), regroupant des représentants de la CGT, CFDT, FSU, CNT et de Solidaires. « Notre objectif, c’est de dénoncer le faux programme social du RN, résume Jean-Paul, militant de l’association. Le RN fait semblant de soutenir les mouvements sociaux mais l’extrême droite n’a jamais aimé les syndicats. Ça se voit dans les municipalités qu’elle tient, où ils essaient de fermer les bourses du travail dès qu’ils arrivent au pouvoir. »

Pour les militants, la lutte passe par un travail précis de décorticage de l’argumentaire du Rassemblement national, ainsi qu’un rappel de son histoire. Sur le papier, mais aussi lors de nombreuses sessions de formation destinées aux militants syndicaux. « On aimerait bien ne pas avoir autant de demandes, malheureusement on en a de plus en plus », reconnaît Jean-Paul.

Habitué à travailler avec Visa, le responsable confédéral de la lutte contre l’extrême droite à la CGT décrit également un travail « de longue haleine » au sein de son organisation. Pascal Debay ne compte plus les journées de formation locale organisées à destination des syndiqués. « On fait tout en interne pour que ces idées ne se développent pas. Nos équipes syndicales sont confrontées à ces questions, alors on leur donne de quoi convaincre les salariés, faire réfléchir, argumenter… On a essayé d’organiser beaucoup de ces formations dans les endroits les plus contaminés, comme le Pas-de-Calais, la Meurthe-et-Moselle, le Vaucluse… »

« Déceptions politiques »
Quand il s’agit d’évoquer la place prise par le Rassemblement national dans son territoire, Frédéric Grandsart semble toutefois désabusé. En 2017, ce secrétaire de l’union départementale CGT du Pas-de-Calais a participé à la création d’un observatoire intersyndical destiné à « dénoncer la posture de l’extrême droite », mais, depuis, il a le sentiment que le RN s’est banalisé. « Maintenant, ça fait partie du paysage local. Ils surfent sur la situation économique. » Pour autant, le syndicaliste n’a pas renoncé : « Devant les hôpitaux en lutte, quand les élus RN sont venus, on a su les faire partir. On a rappelé qu’ils avaient voté pour les coupes budgétaires qu’ils venaient dénoncer. On est vigilants sur les piquets de grève et on a réussi à les tenir à distance. » Le cégétiste s’inquiète tout de même des protestations qu’il a entendues dans la bouche d’adhérents quand le syndicat a appelé à voter contre l’extrême droite.

Des discours que François Falize entend également dans la Somme, dans un territoire où l’emploi aéronautique a été particulièrement sinistré. « Ici, le bassin d’emploi a été complètement laminé, et les déceptions politiques se sont accumulées, souligne ce membre de l’union locale CGT d’Albert . Du coup, de plus en plus de gens sont tentés de se dire : “On a essayé la gauche, on a essayé la droite, sans résultat à chaque fois. Alors pourquoi ne pas tenter l’extrême droite ?” J’aimerais vous dire que cela ne concerne pas les adhérents CGT, mais c’est malheureusement faux : j’entends parfois des militants tenir des propos sur le mode “on en a ras le bol, foutons les étrangers dehors” qui trahissent une absence de culture politique et de culture tout court. »

Des opinions qui se retrouvent parfois dans les votes de certains adhérents ou sympathisants. Si, d’après le sondage d’Harris Interactive sur le vote des sympathisants syndicaux aux élections européennes de 2019, le score du Rassemblement national auprès des électeurs proches d’un syndicat de salariés était plus faible que la moyenne nationale, il était plus important qu’en 2017. Surtout, les sympathisants de Force ouvrière auraient voté à 30 % pour le RN, quand le score national était de 23 %. « Certaines sections de Force ouvrière sont gangrenées par l’extrême droite mais ils ferment les yeux », dénonce Frédéric Grandsart. Yves Veyrier, secrétaire général du syndicat, renvoie la responsabilité aux politiques. « La montée du vote RN, c’est le produit d’une démission des partis républicains, qui ont baissé les bras devant l’économie. Il faut redonner aux politiques une ambition de justice sociale, c’est comme ça qu’on lutte efficacement contre le racisme. Mais nous nous sommes toujours mobilisés pour un internationalisme ouvrier et contre toute forme de racisme. » Mais pour Philippe Gommard, de la CGT Renault à Flins, c’est bien à la base que commence ce combat. « La lutte sociale est la meilleure façon de souder les gens : dans les débrayages, il n’y a pas de distinction d’origine ! »

12 juin - https://marchedeslibertes.fr/

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