- Article publié le 5 novembre 2025
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La Fédération CGT des Services publics dépose un préavis de grève pour les journées des 20, 21, 22, 24 et 25 novembre 2025, Journée internationale d’éradication des violences faites aux femmes
Objet : Préavis de grève de 0 h à 24 h pour les journées des 20, 21, 22, 24 et 25 novembre 2025, Journée internationale d’éradication des violences faites aux femmes, couvrant l’ensemble des salarié·es et agent·es des villes, départements, régions, établissements publics, métropoles, offices de l’habitat, services et entreprises de l’eau et de la thanatologie.
Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames et Monsieur les Ministres,
Trente ans après l’adoption du programme de Beijing dont la France est signataire, faut-il le rappeler, les violences faites aux femmes demeurent un fléau majeur, trop d’engagements ne sont pas tenus, les financements bien trop insuffisants. Il est grand temps de passer enfin des paroles aux actes.
Les chiffres les plus récents publiés par la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF) et le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) témoignent d’une situation alarmante :
- 230 000 femmes majeures déclarent avoir été victimes de violences sexuelles, dont près de 60 % ont entre 18 et 24 ans ;
- 373 000 femmes déclarent avoir subi des violences conjugales ;
- 96 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint en 2023, et 327 ont échappé de peu à un féminicide ;
- 57 % des violences sexuelles enregistrées concernent des mineur·es ;
- 94 % des auteurs sont des hommes ;
- Les violences sexuelles enregistrées ont plus que doublé depuis 2016 ;
- 94 % des victimes du système prostitutionnel sont des femmes ;
- 42 % des victimes du système prostitutionnel sont des mineur·es ;
- 9 % des viols ou tentatives de viols ont lieu au travail ;
- 30 % des salariées ont déjà été harcelées ou agressées sexuellement sur leur lieu de travail ;
- 70 % des femmes victimes de violences au travail déclarent n’en avoir jamais parlé à leur employeur.
Pour celles qui parlent, c’est souvent la double peine : 40 % estiment que la situation s’est réglée en leur défaveur, par une mobilité forcée, voire un licenciement.
Du sexisme « ordinaire » au féminicide en passant par le harcèlement, ces violences forment un continuum des violences que subissent les femmes tout au long de leur vie. Les lieux de travail n’en sont pas exclus, les violences y sont massives bien qu’invisibilisées.
Nous exigeons la mise en place immédiate de mesures concrètes contre les violences sexistes et sexuelles au travail.
La CGT, avec d’autres organisations syndicales et des associations féministes, des juristes, des défenseur·es des droits humains et des expert·es, réclame l’adoption d’une loi-cadre intégrale porteuse de plus de 130 propositions (législatives, réglementaires, budgétaires…) pour s’attaquer au continuum des violences sexuelles dans leur globalité, de façon à prendre en compte l’ensemble des aspects de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, notamment la prévention, la sensibilisation de la population, l’accompagnement des victimes dans l’emploi, la santé, le parcours judiciaire, des sanctions et des suivis socio-judiciaires des agresseurs avec des programmes spécifiques, des tribunaux dédiés aux violences sexistes et sexuelles composés de magistrat·es formé·es et motivé·es, ayant des compétences à la fois pénales et civiles, couvrant ainsi l’ensemble des aspects de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans toutes les sphères de notre société.
Il est temps de mener une politique publique globale permettant de coordonner l’ensemble des actions des ministères concernés pour s’attaquer à ce fléau endémique.
Afin de ne pas laisser les services publics et les associations travailler dans des conditions déplorables, sans la capacité d’accueillir les victimes qui le demandent, Il est urgent d’adosser à cette politique un budget à la hauteur au moins de 2,6 milliards alors que l’État ne dépense que 12,7 millions d’euros par an pour lutter contre les violences sexuelles, soit 0,003 % du budget de l’État.
En 2023, la France ratifiait la convention n° 190 de l’OIT (Organisation internationale du travail), du 21 juin 2019, relative à l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail. La ratification était actée à droit constant sans amélioration de la législation française et sans aucune prise en compte de la recommandation n° 206 qui la complétait et orientait les politiques des États.
Cette recommandation n° 206 également adoptée par l’OIT proposait des mesures pour que les États mettent en place des politiques relatives à l’application de la convention. Ces mesures appropriées visaient à atténuer l’impact de la violence domestique dans le monde du travail devant donc comprendre : « un congé pour les victimes de violence domestique, des modalités de travail flexibles, une protection temporaire contre les licenciements, une prise en compte de ces violences dans l’évaluation des risques sur le lieu de travail, un système d’orientation vers les dispositifs publics visant à atténuer la violence domestique, la sensibilisation aux effets de la violence domestique ».
Ces mesures inscrites dans la recommandation n° 206 ont été adoptées avec la convention, Il est temps que la France respecte ses engagements. Pour ce faire, il nécessaire que le droit français évolue et que soient créés de nouveaux droits sociaux pour les salarié·es victimes de violences domestiques, pour qui le travail est un levier d’émancipation, un lieu de refuge et une potentielle porte de sortie. La loi française qui définit et interdit les violences sexistes et sexuelles reste en l’état insuffisante pour protéger les victimes.
Huit ans après avoir fait de l’égalité entre les femmes et les hommes la « Grande cause du quinquennat », le président Emmanuel Macron n’a pas su donner à cet engagement les moyens d’une politique tangible et cohérente. L’immobilisme gouvernemental, les promesses non tenues et l’absence d’investissements à la hauteur des besoins font de la France un très mauvais élève de la lutte contre les violences faites aux femmes.
Il est urgent que la France s’aligne sur les meilleures législations du monde. En Espagne, les victimes de violences domestiques ont le droit à la mobilité géographique et au changement de lieu de travail, à l’accès à la retraite anticipée, à la suspension de la relation de travail avec emploi réservé… Aux Philippines, les victimes de violences conjugales peuvent bénéficier de 10 jours de congés payés. Le Canada, la Nouvelle-Zélande et l’Irlande sont également en avance sur ce sujet.
Au regard de ces éléments, nos revendications sont les suivantes :
- Une loi-cadre intégrale couvrant l’ensemble des aspects de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans toutes les sphères de notre société ;
- L’effectivité de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes : « à travail égal, salaire égal » ;
- La stricte application de l’accord national du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes mettant en place un·e référent·e harcèlement, avec des moyens dédiés et identifiés par les personnels ;
- Le respect de l’obligation en matière de santé et sécurité de l’employeur inscrite dans le Code du travail ;
- De nouveaux droits pour protéger et accompagner les victimes de violences : abrogation de la journée de carence, interdiction des licenciements et révocations, droits à des autorisations spéciales d’absences rémunérées pour faire des démarches, droit à la mobilité géographique et fonctionnelle ;
- Rendre effectives la déclaration et la reconnaissance des accidents de travail ou de service dans le cadre de VSS ;
- Obligation d’identifier les violences sexistes et sexuelles dans les documents uniques d’évaluation des risques professionnels (DUERP) ;
- Accès aux soins garanti avec le remboursement à 100 % des consultations en psycho-traumatologie pour les victimes.
La lutte contre les violences sexistes et sexuelles doit être menée sans faiblesse dans les entreprises et les administrations et l’espace public.
Le 20 novembre, la Journée internationale des droits de l’enfant vient aussi rappeler quelques jours avant le 25 novembre la nécessité d’une protection universelle contre toutes les formes de violence. Les enfants sont souvent les victimes collatérales ou directes des violences conjugales et sexuelles. La lutte contre les violences faites aux femmes doit donc inclure un volet spécifique de prévention, d’éducation et de soutien psychologique des enfants victimes ou témoins, à travers des dispositifs coordonnés entre les services sociaux, scolaires et judiciaires.
Par conséquent, nous appelons l’ensemble des agent·es, salarié·es et citoyen·nes à se mobiliser et à organiser des actions locales, partout en France, les journées du 20 et 22, 25 novembre 2025, pour exiger une société où les femmes et les enfants puissent vivre en sécurité, dans la dignité et l’égalité. La CGT appelle à la vigilance et à l’action ! Les violences sexistes et sexuelles doivent être combattues collectivement, institutionnellement, au travail ou en dehors, au sein ou en dehors du couple, instamment et constamment.
L’enjeu en est la possibilité de fonder une société émancipée, démocratique, juste, égalitaire, qui soit aux antipodes d’un patriarcat périmé et d’une extrême droite réactionnaire.
Conformément aux dispositions légales et réglementaires en vigueur, la Fédération CGT des services publics dépose un préavis de grève pour les journées des 20, 21, 22, 24, 25 novembre 2025 de 0 h à 24 h, couvrant l’ensemble des agent·es de la fonction publique territoriale, ainsi que les salarié·es du champ privé du logement social, de l’eau et de la thanatologie.
Recevez, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de nos salutations respectueuses.
Pour la fédération CGT des Services publics,
Natacha POMMET
Préavis de grève adressé à :
- M. Sébastien LECORNU, Premier Ministre
- Mme Amélie de MONTCHALIN, Ministre de l’Action et des Comptes publics
- M. David AMIEL, Ministre délégué chargé de la Fonction publique et de la Réforme de l’État
- Mme Aurore BERGÉ, Ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations
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