- Article publié le 12 avril 2023
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Le billet d’humeur de Christophe Prudhomme | La Sécu, elle est à nous
Nos cotisations sociales correspondent à une partie de notre salaire que nous avons décidé de mettre dans une caisse de solidarité appelée Sécurité sociale, afin de pouvoir payer nos frais de santé, bénéficier d’allocations familiales, pouvoir être accompagné en cas d’accident du travail et de maladie professionnelle et toucher une pension de retraite. Il ne s’agit pas de « charges » pour les employeurs, mais bien de ce qu’on appelle le salaire socialisé, qui nous appartient. Il suffit d’aller aux États-Unis pour comprendre. Là-bas, les salariés doivent se payer une assurance-santé et mettre de l’argent dans un fonds de pension pour capitaliser pour leur retraite.
L’argent de la Sécurité sociale appartient aux travailleurs et il est légitime qu’ils en assurent la gestion. Mais ce n’est plus le cas. Dès les années 1950, et surtout après les ordonnances de 1967, le patronat a repris la main en imposant le paritarisme qui lui a permis, avec l’aide de certains syndicats complaisants, de s’assurer le contrôle du système. Puis l’État, sous le gouvernement Juppé, a pris le contrôle avec la loi de financement de la Sécurité sociale. La question qui se pose aujourd’hui est de pouvoir décider du montant de notre rémunération que nous désirons consacrer à notre protection sociale, et de son utilisation. Pour cela, plusieurs conditions sont nécessaires. Il s’agit de redonner les pouvoirs de gestion aux caisses et de supprimer la loi de financement de la Sécurité sociale. Ce pouvoir existe encore pour le régime particulier Alsace-Moselle, dont le conseil d’administration peut faire varier le niveau de cotisation en fonction des dépenses de l’année antérieure, ce qui permet d’éviter les déficits utilisés pour imposer des plans d’économies. Cette caisse, présidée aujourd’hui par un membre de la CGT, est à l’équilibre et permet un remboursement à 92 % de l’ensemble des frais de santé, avec un niveau de cotisation qui est loin d’atteindre le plafond autorisé. La deuxième condition est de revenir à la proportion de 75 % de représentants des assurés sociaux dans les conseils. Enfin, il faut rétablir les élections des représentants dans les caisses – les dernières datent de 1983, ce qui constitue une véritable régression démocratique.
La Sécurité sociale n’est pas une administration de l’État, mais un conquis des travailleurs qui permet de sortir du marché le financement de besoins sociaux essentiels. Les capitalistes n’ont jamais accepté que ce secteur, représentant près d’un tiers du PIB, leur échappe. Ils n’ont eu de cesse depuis plus de soixante-dix ans d’essayer d’en récupérer le maximum.
Nous sommes à un moment de rupture où il faut faire des choix. Soit nous les laissons poursuivre leur opération de prédation d’une partie de nos salaires, soit nous exigeons d’en récupérer le contrôle plein et entier. Ce doit être une exigence dans le cadre de la bataille sur les retraites.
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