- Article publié le 27 mai 2021
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CNFPT | Contribution au projet d’établissement du CNFPT
La CGT, la Fédération CGT des services publics et plus particulièrement la Délégation CGT au Conseil d’Administration et au Conseil National d’Orientation réaffirment leur attachement au CNFPT, né avec la décentralisation de 1984 et qui a œuvré et continue d’œuvrer pour la professionnalisation des agents territoriaux, leur expertise et leur reconnaissance, leur développement de carrière et l’unification de la fonction publique territoriale.
Le cadre national issu de la décentralisation de 1984 a en effet, apporté une indéniable plus-value pour les collectivités en termes de qualité de service public, grâce notamment à un développement important de la formation des agents et donc du CNFPT.
Or depuis de nombreuses années sous assistons à de multiples attaques contre le CNFPT : 2016 baisse de la cotisation à 0,9%, 2019 prise en charge du financement de la formation des apprentis à hauteur de 50%, instituée par la loi de transformation de la fonction publique et une augmentation exponentielle de la part dédiée aux formations de la police municipale.
La CGT porte la nécessité de s’unir, autour d’un projet, pour peser contre la volonté de libéraliser complètement la formation professionnelle et pour préserver notre organisme de formation.
La CGT, première organisation représentative des agents de la FPT ne désertera pas ses responsabilités à propos de cet établissement, certes au paritarisme tronqué, mais création profondément sociale qui ne saurait fonctionner sans la participation active des agents à la vitalité de la formation professionnelle.
Cette contribution au projet d’établissement portée par la CGT est donc à la fois ambitieuse et réaliste. Elle repose avant tout sur les besoins des agents en matière de formation professionnelle, proposant un véritable ascenseur social basé sur une offre de formation de haute qualité.
Contexte :
Avec un taux de cotisation ramené de 1% à 0,9%, le CNFPT a vu ses ressources remises en cause en 2016 avec une baisse de 10 % de la cotisation obligatoire.
De même, la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique impose à l’établissement de verser aux centres de formation des apprentis 50 % du coût des frais de formation, les 50 % autres restant à la charge des employeurs territoriaux. Cette ponction qui détourne 7,5 % du budget de fonctionnement en 2021 et plus de 10 % en 2022 selon les prévisions budgétaires, est inacceptable, alors que les besoins en formation des agents territoriaux sont énormes. Ce montant pour l’instant plafonné à 25 millions d’euros est revu annuellement ce qui ne garantit aucune sécurité financière pour le CNFPT.
Le poids grandissant des polices municipales en termes d’effectifs et de missions vient grever également le budget du CNFPT. La CGT revendique un financement supplémentaire et obligatoire pour les employeurs de policiers municipaux.
Dans le même temps, le CNFPT se doit de poursuivre sa réflexion sur l’utilisation de l’excédent financier lié notamment à la conjoncture de la crise sanitaire.
Les orientations de l’établissement doivent tenir compte de ces données.
La formation ne peut être détachée de la réalité statutaire et des différentes phases de la carrière de l’agent. Elle doit permettre un vrai déroulement de carrière dans le cadre de la reconnaissance des qualifications des femmes et des hommes qui travaillent dans la fonction publique territoriale.
Parce qu’elle est, à la fois, un droit individuel garanti collectivement et un investissement pour le service public territorial, la formation doit être accessible à tous les agents et fonctionnaires territoriaux. C’est pourquoi, nous militons pour que l’offre de formation du CNFPT soit réellement construite à partir des plans de formation des collectivités, prenant en compte les besoins des personnels pour mettre en oeuvre les politiques publiques des collectivités. Le CNFPT doit s’attacher à analyser les plans de formations mais également à interroger continuellement la remontée (ou la non-remontée) des besoins des agents. La commission prospective devra poursuivre, dans ce sens, l’étude débutée en 2021 tout en interrogeant le rapport des agents à la formation professionnelle.
Les métiers se transforment sous l’impact de la digitalisation des relations sociales, du développement de l’intelligence artificielle et des besoins toujours évolutifs de la population. A cela s’ajoutent des spécificités propres : la transformation de l’action publique et le bouleversement que connaît l’organisation territoriale depuis deux décennies nécessitent des efforts d’adaptation particulièrement difficiles ; la nature de nos métiers, dont certains sont à fort niveau de pénibilité, provoquent de nombreuses inaptitudes physiques empêchant la continuité de l’activité professionnelle, problématique renforcée par le recul de l’âge de la retraite.
Le fil conducteur de nos propositions est de faire en sorte que le CNFPT réponde aux besoins des agents, qu’il permette une égalité d’accès et une qualité de la formation et favorise l’ascenseur social.
I. RÉPONDRE AUX BESOINS DES AGENTS
Le droit à la carrière fait partie du statut de la fonction publique, mais la catégorie et le grade sont les seuls éléments de qualification dans la fonction publique et le concours reste la possibilité la plus probable d’accéder à un grade ou à une catégorie supérieure.
1. La construction de l’offre de formation :
Nous sommes très attachés à la construction d’une offre de formation à partir des plans de formation qui doivent être établis par les collectivités territoriales et les établissements publics en fonction des besoins des agents. La formation continue à la demande des agents, les formations d’adaptation à l’emploi, les formations de perfectionnement et les formations d’adaptation à un nouvel emploi dans le cadre d’un reclassement professionnel pour raison médicale, doivent faire l’objet de plans de formation élaborés, après concertation des organisations syndicales, sur la base des demandes formulées par les agents et par les services, dans toutes les collectivités. Plus globalement nous demandons que les plans de formation comprennent obligatoirement un volet de lutte contre l’illettrisme et pour l’apprentissage de la langue française, un volet de sensibilisation à la lutte contre les discriminations (LCD) et pour l’égalité républicaine, un volet relatif à la prise en compte du handicap en situations professionnelles, un volet relatif au développement du bien-être au travail et à la prévention de la pénibilité, un volet relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Ces plans de formation doivent être validés par les comités techniques et soumis aux assemblées délibérantes des collectivités. Ils pourront être mutualisés pour les collectivités de moins de 50 agents. Et ils devront obligatoirement être transmis aux comités régionaux d’orientation (CRO).
La crise sanitaire a mis en avant le rôle essentiel des agents publics territoriaux. Les valeurs du service public en tant que fondement du CNFPT doivent être inscrites dans les formations dispensées par le CNFPT.
La construction de l’offre de formation doit résulter d’un débat politique argumenté avec des études et bilans fiables et un débat délibératif constant. Les mécanismes de construction de l’offre et le contenu des formations devront, quant à eux, se dérouler dans les commissions et notamment au sein de la commission formation, ainsi qu’au sein du CNO.
La communication du CNFPT doit être améliorée notamment au niveau du porté à la connaissance de tous les agents de l’offre de formation (catalogue).
Pour répondre aux besoins des agents, nous proposons que soient collectées, à minima et de façon non exhaustive, les demandes de formation formulées par les agents dans le cadre des entretiens professionnels. Pour les petites collectivités, cette collecte pourrait s’appuyer sur le travail de collaboration entre le CNFPT et les Centres de gestion dans le cadre des conventions régionales CNFPT.
2. Les préparations aux concours et examens :
Nous considérons que l’accompagnement et la durée de préparation ne sont pas satisfaisants. D’ailleurs nous faisons le constat d’un décalage entre les épreuves des concours et le contenu de leur préparation.
Nous voulons que les préparations aux concours et examens soient adaptées à chaque agent en fonction de ses résultats aux tests de positionnement, que leur durée soit augmentée, qu’une préparation soit accordée pour chaque agent qui en fait la demande. Il s’agit de développer une vraie préparation qualifiante, c’est-à-dire qui ne prenne pas seulement en compte ceux qui ont déjà le plus haut bagage scolaire.
3. Les agents des petites collectivités :
La problématique des agents des petites collectivités doit faire l’objet de toutes les attentions car de nombreux freins au départ en formation existent, en particulier la question du remplacement des agents. La piste d’un financement dédié pour aider notamment les petites collectivités à absorber les salaires de remplacement des agents qui partent en formation pourrait être examinée avec les centres de gestion.
Le CNFPT doit développer une communication qui soit ciblée vers les agents et plus particulièrement auprès des agents de catégorie C car beaucoup d’entre eux n’ont pas accès directement à l’offre de formation.
4. Les cadres :
Une réflexion urgente doit être portée sur l’offre de formation à destination des cadres. Il est indispensable que les cadres de la fonction publique territoriale soient incités à s’inscrire aux formations offertes par le CNFPT et non plus sur les formations proposées par les prestataires privés qui développent un discours managérial. Les formations destinées aux cadres doivent toutes reposer sur un encadrement animé par le sens du service public, la reconnaissance des personnels, l’intérêt commun d’une communion entre usagers et personnels.
5. Les écoles de service public :
L’Institut national des études territoriales (INET) :
L’INET, à cet égard, doit donner l’exemple de formations centrées sur la nécessaire communion des personnels et sur la qualité de vie au travail comme gage de qualité du service public de proximité. Au-delà des métiers et des fonctions, ce sont les valeurs de collaboration, d’entraide et de solidarité (confortées par un statut protecteur et équitable) qui ont donné à la fonction publique territoriale un sentiment de fierté et d’efficacité dans l’accomplissement de missions positives pour la population. L’idéologie managériale, le « new public management » et la stigmatisation des fonctionnaires sont étrangers à cette culture du service public qui n’a pas attendu les injonctions gouvernementales pour évoluer et s’adapter continûment pour toujours mieux répondre aux besoins des populations. Les pressions financières qui grèvent désormais la qualité des services publics n’ont pas à être compensées par un management insécurisant et générateur de souffrances. La fierté de servir au mieux le public est le principal atout de nos organisations du travail. Le rôle des organisations est principalement de libérer le travail, non de l’entraver. Voilà ce nous aimerions voir enseigné à nos cadres dirigeants.
L’École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers professionnels (ENSOSP) :
Le décret du 7 juin 2004 relatif à l’ENSOSP stipule un certain nombre d’obligations et notamment qu’un contrat d’établissement pluriannuel conclu avec l’État et le CNFPT fixe les objectifs et les moyens d’action de l’école pour l’exercice de ses missions. Nous constatons un manque de transparence dans le financement et la gouvernance de l’école.
Nous demandons à ce que le CNFPT dispense le tronc commun de formation et que ce dernier soit positionné dans l’ingénierie de formation des officiers. Nous proposons l’utilisation des antennes régionales qui diminuerait ainsi l’éloignement des stagiaires de leur lieu d’exercice, les coûts et renforcerait les liens avec le CNFPT, en dehors de liens uniquement financiers.
6. Les frais de déplacement :
Sans préjudice du maintien de la responsabilité des employeurs dans le financement des frais de déplacement qui accompagnent les départs en formation, nous considérons que la prise en charge des frais de déplacement par le CNFPT doit être revue afin de réparer les inégalités que le système en vigueur a généré. Pour la CGT, l’accès à la formation ne doit pas représenter un préjudice financier pour les stagiaires.
II. FAVORISER L’ASCENSEUR SOCIAL
Ce qui est attendu de la formation professionnelle, de la part des agents, c’est d’abord les moyens d’améliorer leur vie au travail par la maîtrise de leur professionnalité et par les possibilités d’ascension sociale.
1. La construction de parcours professionnels longs, qualifiants à la demande de l’agent :
Les publics :
o Les agents « faisant fonction« et qui ne peuvent pas changer de catégorie (ATSEM, agents des services informatiques, de l’événementiel...) : c’est leur donner les moyens de se qualifier et de passer des concours,
o Les agents souhaitant changer de filière quel que soit leur grade et leur catégorie : leur permettre d’intégrer une nouvelle filière,
o Les agents qui souhaitent évoluer vers une catégorie supérieure.
Les moyens :
o Un cursus de base par catégorie sur l’environnement territorial et le sens du service public avec en parallèle des formations de remise à niveau si besoin,
o Des formations spécifiques pour intégrer une nouvelle filière, pour occuper un nouveau poste ou pour préparer un concours de catégorie supérieure à la sienne,
o Se saisir de l’offre catalogue avec un accès prioritaire,
o Ponctuer le parcours d’événements regroupant les trois catégories pour favoriser les échanges d’expériences, permettre aux stagiaires de tisser leur réseau et d’avoir accès à une bourse d’emploi et de recherche de stages.
III. FAVORISER LA QUALITÉ DE L’OFFRE DE FORMATION
1. Des formations en présentiel qui doivent rester la norme :
Le contexte de crise sanitaire ne doit pas servir de prétexte à ce que le tout distanciel devienne la règle. Les formations en présentiel doivent continuer à être organisées, sortir de son cadre habituel, partager de vive voix des expériences, créer des réseaux sont dans l’ADN de la formation.
Par ailleurs, la fracture numérique et les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre de la formation en distanciel sont malheureusement toujours d’actualité avec un impact sur la charge de travail des agents territoriaux, des formations qui ont lieu hors temps de travail avec du matériel informatique et des locaux non adaptés.
Pour la mise en oeuvre des formations en distanciel, nous demandons qu’une convention tripartite soit systématiquement établie entre la collectivité, l’agent et le CNFPT. Cette convention garantira les conditions de mise en en oeuvre de la formation et des moyens donnés aux agents.
La formation et un accompagnement au plus près des agents, les dynamiques de groupes et les rencontres sociales participent autant de la formation que les acquisitions techniques.
2. Privilégier les formations inter-collectivités :
Nous considérons également que les formations inter-collectivités doivent être privilégiées aux formations intra-collectivités car elles permettent, comme les formations en présentiel, le partage d’expériences entre des agents venant de collectivités différentes et de secteurs d’activités différents. Les formations intra-collectivités sont organisées par les employeurs sur des sujets qui vont la plupart du temps servir leurs intérêts.
3. Établir un bilan de l’accès à l’offre de formation et aux formalités d’inscription en formation :
En quelques années, l’inscription en ligne et la dématérialisation du catalogue de formation ont profondément transformé l’accès à la formation. De nombreuses remontées nous indiquent des difficultés ne serait-ce que pour s’inscrire en formation. Sans forcément remettre en cause la dématérialisation de cet accès, des améliorations sont certainement envisageables pour répondre aux difficultés rencontrées.
Nous demandons également que la problématique des agents refusés aux stages fasse l’objet d’une étude afin d’identifier des pistes d’amélioration, et pour cela nous demandons la mise en place d’un système d’inscription qui permette d’enregistrer tous les refus de formation.
4. Les intervenants :
Nous avons pu constater au fil des années que le nombre d’intervenants issus de la fonction publique territoriale diminuait. Nous souhaitons que cette tendance s’inverse. Pour cela, nous proposons qu’un état des lieux soit réalisé et qu’une procédure de recrutement soit déterminée dans le cadre d’une commission paritaire.
Nous aimerions ouvrir une discussion sur l’évolution des formateurs et sur la place prise par les marchés de formation. Certaines évolutions nous inquiètent et nous avons besoin de connaître les raisons objectives ou les choix qui conduisent à s’adresser à des organismes privés plutôt que de faire appel à un formateur en interne à la fonction publique.
Nous voulons donc que le système de recrutement des intervenants soit transparent, que les fonctionnaires territoriaux puissent postuler facilement, que les manques soient analysés pour que des solutions soient trouvées.
5. Les instances :
Nous revendiquons un paritarisme de plein exercice avec le collège des élus locaux.
Le conseil d’administration doit être un espace démocratique d’échanges sur les sujets structurants et essentiels pour l’établissement et plus largement pour la formation professionnelle des agents territoriaux.
Nous réaffirmons le rôle primordial de la commission prospective et du comité d’évaluation, ces deux instances ont un rôle essentiel car leurs travaux apportent un éclairage pertinent tant au CA qu’au CNO. Les études doivent systématiquement prendre en compte les avis et les besoins des agents sans passer par le prisme des collectivités territoriales. Les moyens humains de ces deux instances doivent également être renforcés.
Le CNO doit pouvoir remplir son rôle de conseil pour toutes les questions de formations. Son activité doit également être mieux valorisée auprès des collectivités.
D’autre part, nous proposons d’explorer les outils statistiques de l’établissement, de les optimiser afin qu’ils constituent de véritables supports d’aide à la construction de l’offre.
Nous sommes également mobilisés pour défendre les missions de l’observatoire de l’emploi, des métiers et des compétences de la fonction publique territoriale qui était jusqu’au 1er janvier 2021 en charge de la consolidation des bilans sociaux en lien avec la DGCL. La loi du 6 août 2019 dite de transformation de la fonction publique a porté une atteinte grave aux outils publics d’investigation, d’étude et de la statistique de la fonction publique territoriale en supprimant le dispositif qui prévoyait une agrégation et une consolidation nationale des données de la fonction publique territoriale par le CNFPT.
Enfin, le CNFPT doit également favoriser le pluralisme des points de vue dans les différents supports de communication. Ainsi, la CGT demande que les représentants des organisations syndicales qui portent les intérêts des agents puissent disposer d’une tribune permanente.
Plus largement, la vie des instances politiques du CNFPT doit être relatée dans la communication du CNFPT.
Conclusion :
Nous réaffirmons notre attachement au CNFPT, établissement public national paritaire déconcentré car il est déterminant dans l’efficacité du service public territorial. La formation dispensée par le CNFPT est le gage du maintien d’une fonction publique territoriale unique pour un service public de proximité garantissant à tous son accessibilité. Pour la CGT, le CNFPT doit être davantage à l’écoute des besoins de formation des agents territoriaux.
Or, La situation financière actuelle du CNFPT ne permet pas de répondre à ces enjeux. Il en va donc de la survie de l’établissement de mener avec l’ensemble des composantes du conseil d’administration la bataille pour le rétablissement du 1 % et l’obtention d’un financement dédié à la formation des apprentis.
Fait à Montreuil, le 3 mai 2021
Documents joints
1 20210503_contribution_cgt_au_projet_d_etablissement_du_cnfpt pdf
2 20210510_reponse_deluga_contribution_cgt_projet_d_etablissement pdf