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  • Article publié le 18 octobre 2017
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CNFPT | Intervention des organisations syndicales CGT, CFDT, FO, UNSA, FA-FPT au CA du CNFPT du 27 septembre 2017 – Prononcée par Christophe COUDERC, vice-président, CGT

Monsieur le Président,

Les organisations syndicales CGT, CFDT, FO,, FA FPT et UNSA siégeant en cette enceinte, c’est-à-dire l’unanimité du collège représentant les agents de la fonction publique territoriale ne pouvaient pas débuter ce CA sans évoquer la construction de l’offre de formation 2018 et plus particulièrement la mise en place massive et accélérée de la pédagogie inversée, tant cette dernière suscite des interrogations, des doutes et des inquiétudes sur la qualité du service public confié au CNFPT.

De quoi parlons-nous ?
 de l’obligation d’une préparation individuelle préalable au stage en présentiel dont les modalités restent, à ce stade, très incertaines,
 de la compression du présentiel des formations en inter-collectivités,
 du rétablissement des « intras » qui concernent essentiellement les grosses collectivités.

Le recours massif au numérique comporte le risque d’accroître les inégalités entre agents :
 inégalité entre les agents qui ont accès à un poste informatique et ceux qui n’en ont pas.
 inégalité entre les agents qui sont à l’aise avec le numérique et ceux qui ne le sont pas ;
 inégalité entre les agents qui auront un temps garanti statutairement pour se former à distance et ceux qui devront se débrouiller pour trouver du temps hors temps de travail pour consulter les ressources mises en ligne ;
 renforcement des inégalités, au bout du compte, entre les agents selon la taille de leur collectivité.

Les usages numériques n’évitent pas les problèmes fondamentaux de la formation professionnelle des fonctionnaires territoriaux : égalité d’accès aux savoirs, appropriation des savoirs, garanties que la formation professionnelle se fasse sur le temps de travail, garanties que la formation professionnelle des fonctionnaires territoriaux contribue à forger une culture commune du service public local.

De plus la méthode dite de la pédagogie inversée est contestée. Elle n’a pas fait ses preuves !

Dans la formation professionnelle, il n’y a pas d’un côté la théorie et de l’autre la pratique. Les temps de formation avec un formateur permettent aux agents de s’interroger sur leur pratique professionnelle. Les échanges collectifs sont absolument indispensables.

La formation en présentiel, dans les locaux du CNFPT, avec des stagiaires issus de différentes collectivités, c’est ce qui permet de s’émanciper de la pression de l’employeur et garantit aux fonctionnaires territoriaux de pouvoir sortir de leur isolement, d’interroger leurs pratiques, de les enrichir, les conforter pour continuer à remplir leurs missions de service public et au-delà, continuer à se forger une culture de la fonction publique.

Vous le voyez, le recours massif au distanciel pose de très nombreux problèmes de principe. Ces problèmes auront des conséquences très concrètes sur l’ensemble des agents.

De ce que nous savons de l’offre de formation 2018, c’est l’offre inter-collectivités, celle qui est la plus mutualisée, qui se verrait très largement hybridée par des temps de formation à distance au profit du développement de formations internes, voire de formations « sur-mesure ». Cette hybridation va modifier leur physionomie et réduire le temps de présence qu’elles nécessitaient jusque-là.

Vous comprendrez que nous soyons particulièrement attentifs à l’organisation des préparations aux concours du CNFPT afin qu’ils jouent leur rôle d’ascenseur social. Aussi nous sommes particulièrement vigilants à l’hybridation des préparations aux concours.

Suite à nos interpellations aussi bien par courrier qu’à l’occasion du dernier CNO, il nous a été répondu qu’un courrier serait adressé aux exécutifs et aux directions générales de collectivités pour leur demander de modifier leur règlement de formation de manière à introduire le droit à la formation en distanciel.

Nous ne savons pas comment les employeurs vont prendre une telle demande de la part du CNFPT ! Mais pour modifier un règlement de formation encore faut-il qu’il y en ait un et, lorsque l’on connait le nombre de véritables plans de formation au regard du nombre d’employeurs, on se doute que le nombre de règlements de formation est encore inférieur.

Par ailleurs, nous rappelons qu’il ne s’agit que d’un vœu qui ne peut avoir d’obligation contraignante.

Enfin, dans la période de contrainte financière actuelle, quelle collectivité pourra immédiatement s’équiper d’une salle dédiée et d’outils informatiques à destination de ses agents pour leur permettre de réaliser la séquence "numérique" du stage ? Déjà, un nombre conséquent d’agents ne possède pas d’adresse électronique professionnelle ou, si une adresse leur a été attribuée, ils n’ont pas accès à un poste informatique. Le CNFPT ne peut pas faire l’économie d’un temps indispensable d’accompagnement.

L’intersyndicale n’est pas hostile au progrès technique quand il favorise le développement humain. Mais la technique n’est jamais neutre. Tout dépend de la manière dont elle est utilisée. Les ressources numériques quand elles viennent enrichir le présentiel permettent d’améliorer les formations. Quand elles sont le prétexte à supprimer des temps de formation à des fins d’économies budgétaires, elles conduisent immanquablement à la dégradation de la qualité des formations.

Vous affirmez que cette orientation est contenue dans le projet d’établissement pour les années 2016-2020 voté le 30 mars 2016 à l’unanimité par le conseil d’administration. Cette orientation constitue la priorité n°7. Pour notre mémoire collective, nous rappelons que cette priorité s’intitule « Développer les usages pédagogiques rendant les stagiaires acteurs de leur formation ». Rendre acteur de sa formation ne passe pas uniquement par l’usage du numérique.

Nous sommes plus attentifs à la priorité 5 qui s’intitule : « Créer une dynamique de formation élargie » et s’articule autour d’orientations dont une précise : « Renforcer les formations organisées en présentiel », et une autre : « Développer l’offre de formation en distanciel, en soutien ou en complément des actions de formation en présentiel ». Il ne s’agit donc pas de remplacer le présentiel.

Il n’est donc indiqué nulle part que ce développement des formations à distance et le recours au numérique doivent se faire en limitant le nombre de jours de formations. Bien au contraire, le projet précise : "Renforcer les formations organisées en présentiel" (p.23 du Projet) ; "développer l’offre de formation en distanciel, EN SOUTIEN OU EN COMPLÉMENT, des actions de formation en présentiel » (p.24 du Projet) Et, il est même précisé "développer les classes numériques (...) qui complètent l’offre en présentiel" (p.28 du Projet).

Les orientations prises de suppressions de jours de présentiel dans certaines formations sont donc en contradiction avec le Projet lui-même. Ce n’est pas ce que pour quoi nous avons voté.

Il ne fait pas de doute que ces évolutions découlent, en particulier, des préconisations de la Cour des comptes qui ne voit d’autre objectif à la formation que la diminution de son coût. Ce que la formation professionnelle peut apporter au bien-être des agents et à l’efficacité des services publics lui importe peu. Ce choix idéologique s’est vu confirmé par la baisse de la cotisation au CNFPT, diminuée de 10% depuis 2016. Notre bataille pour le rétablissement du 1%, reste plus que jamais d’actualité et nous aimerions que cet enjeu ne soit pas masqué par un tour de passe-passe permettant d’affirmer que l’on peut faire mieux avec moins.

A l’heure où les collectivités se dressent contre la politique gouvernementale, plus particulièrement la mise en œuvre de leur étranglement financier, l’urgence est de regrouper les forces du conseil d’administration pour la défense d’un service public de formation professionnelle qui garantisse l’égalité d’accès des agents à la formation, et donc le renforcement du présentiel tel que le défendent les organisations syndicales.

Notre Conseil d’administration doit délibérer et refuser tous diktats gouvernementaux et exiger des moyens supplémentaires pour la formation professionnelle des fonctionnaires territoriaux. Cela passe par la reconquête du 1% à minima.

Vous l’aurez compris, pour les organisations syndicales l’urgence n’est pas de s’engager dans une politique aventuriste d’hybridation à marche forcée qui fragilise le CNFPT, mais de revoir les orientations prises au cours de cet été et de s’en tenir aux orientations du Projet qui positionnent le distanciel à un enrichissement du présentiel. Nous demandons que le CNFPT cherche d’autres solutions pour rendre les agents territoriaux acteurs de leur formation.

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CA CNFPT du 27/09/2017 - Intervention de Christophe COUDERC au nom de l’intersyndicale


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